Tivaouane
Son père qui avait pourtant pressenti ce ‘‘gros nuage’’ en provenance de l’Est se déplacer vers la ville sainte de Tivaouane l’avait déjà prévenu.
L’homme allait être très utile dans le champ religieux du Cheikh où il devait assurer de sa belle voix tous ses programmes religieux. Mousé Alé Mbaay faisait partie des tous premiers laudateurs qui ont chanté pour Cheikh Seydil Hadji Malick Sy à Tivaouane. Et c’est sous la férule de ses proches qu’il étudia, dès son jeune âge, le livre saint du Coran. Un peu plus tard, il sera affecté au Daara du grand érudit Mame Mor Massamba Dierry Dieng à Saint-Louis, pour qu’il accède aux autres branches du savoir. Ses relations avec Cheikh Seydil Hadji Malick Sy ne furent un secret pour personne donc, tellement l’hôte de Maodo investissait à fond dans les différents programmes religieux de son maître.
Mousé Alé, fidèle compagnon du Cheikh fut son premier animateur religieux dans la sainte ville de Tivaouane, nous rapportent avec fierté ses descendants.
D’ores et déjà, on pourrait même aller plus loin en ajoutant que Mousé Alé, ce virtuose de la chanson était identifié comme le meilleur modèle de sa génération. Il avait non seulement le profil idéal pour assurer les partitions auprès du Cheikh, mais aussi était mieux placé que quiconque pour tenir ce rôle à l’époque.
Retenons toutefois que si Serigne Babacar Sy a fait de son homonyme Mbaye Dondé Mbaye, cet excellent chanteur à la voix sublime, la grande fierté de Tivaouane et du Sénégal tout entier, il en est de même pour Mousé Alé et sa famille qui ont réussi, eux aussi, à imposer leur talent sur la scène religieuse, grâce à la bénédiction du Cheikh.
L’action émérite de Baay Mousé Alé fort reconnue par Maodo faisait sa fiérté et son attachement profond à Rassulu’ Llah (PSL) qu’il honorait et chantait lors des grands événements religieux et nuits du Maouloud laissait un message clair.
Par ailleurs, retenons au passage qu’à Dakar, d’autres chanteurs du nom de Baba Ly et Mbaye Guéye assuraient eux aussi ce rôle d’animateur à coté du Cheikh, durant ces mêmes événements.
Il faudrait néanmoins reconnaître que la fidélité qui animait Baay Alé envers le Cheikh était tout autre. Le lieutenant suivait Maodo dans les différentes cérémonies religieuses et officielles organisées par les siens d’une part, et d’autre part par la classe politique étrangère vivant parmi nous.
Toutefois si les autorités religieuses du pays devaient prendre part à une manifestation organisée par l’administration coloniale à l’époque, tous les grands animateurs et chanteurs traditionnels, fidèles à côté de leur guide participaient à la cérémonie et assuraient à leur manière l’animation. Constamment à côté de leurs guides, chacun avait la fierté de chanter les louanges de son vénéré marabout. Et quand le ministre de la France devait un jour être accueilli en héros sur nos sols, à la grande place publique, le rossignol du Cheikh n’avait tardé à déclencher une note si grave qu’elle couvrait toutes les autres voix, nous commentait le regretté Al H. Mbaye Dondé. Sous les flots de paroles qui l’assaillaient, le Cheikh dépassé par cette étonnante belle voix, ne pouvait cacher sa surprise et appelait ainsi à la retenue.
Toutefois, il serait difficile voire impossible de parler de Mousé Alé sans ouvrir une petite parenthèse et brosser en quelques lignes le parcours itinérant de l’illustre Daou-Gaur Mbaay, frère de Moussé Alé Mbaay. L’homme fut aussi piqué par le virus de l’animation, hérité certainement de leurs ancêtres et s’était vaillament rattaché lui aussi au service de Maodo. Son œuvre commune à celle de l’aîné était appréciée de fort belle manière par le public, par son entourage et bien évidemment par ses proches.
Et c’est sous ce rapport que les frères Mbaay furent intronisés Moukhadems par le Cheikh. Ils obtinrent tous les deux une forte récompense vu l’énorme travail qu’ils accomplissaient en commun dans la cour de Cheikh Seydil Hadji Malick Sy où ils connurent à la fois la baraka et toutes sortes d’effluves sacrés provenant de leur guide. Cette famille Mbaay donc a du mérite. Mousé Alé et son frère Daou-Gaur ont honnêtement et inlassablement servi Maodo dans sa mission et fidèlement suivi ses recommandations. Leur rôle d’animateur a été dignement assumé, surtout quand on sait que dans les sociétés d’antan, ce beau métier très riche d’enseignements était voué à une cause noble, contrairement à ce à quoi l’on assiste aujourd’hui.
De nos jours, fils et petits fils à l’image du talentueux Abdoul Aziz Mbaay, de la superbe cantatrice Dial Moussé Alé Mbaay, du virtuose Daour-Gaur junior, sans oublier bien sur le poète en herbe Baay Alé Mbaay dit Chamesdine et dont l’excellent poème, qu’il avait dédié à Maodo et à son grand père, est toujours gardé en souvenir, continuent à magnifier la grandeur de l’œuvre de Mame Moussa Alé et ses frères.
Ce besoin de rapprochement et ce grand amour qui ont toujours existé entre Mousé Alé et Cheikh Seydil Hadji Malick Sy, hérités par leurs descendants et jalousement sauvegardés par les deux familles traduisent tout leur « must »de fidélité.
Voir Abdoul Aziz Mbaay psalmodier les écrits de Cheikh Seydil Hadji Malick Sy merveilleusement interprétés par l’éminent guide spirituel Al Hadji Abdou Aziz Sy Dabax, lors des nuits du Maouloud, nous amènerait forcément à comprendre la complicité qui existait entre leurs deux ascendants.
Par conséquent, sous l’égide du Khalif général des Tidjane Mouhamadou Al Mansour Sy Borom Daara Ji, inlassablement épaulé par son frère Serigne Abdoul Aziz Sy Junior, la famille de feu Mousé Alé, en association avec plusieurs Dahiras organisent annuellement des chants religieux d’une grande portée que viennent rehausser de leur présence des milliers de musulmans au quartier d’El Hadji Malick Sy de Cogn Djaka à Tivaouane.
Pape Amadou Sall
Ëttu Maodo