Par Diakoula CISSE, membre de la Cellule Zawiya Tidiane
Dans le tumulte trépidant des siècles et le vacarme des gloires éphémères, rares sont les hommes dont le souvenir demeure vif, incandescent, presque intemporel. El Hadji Malick Sy, que le destin fit naître en 1855, appartient à cette race d’âmes d’exception dont l’éclat, loin de pâlir avec les ans, ne cesse de rayonner. Il fut plus qu’un érudit, plus qu’un guide. Il fut une étoile, une luminarité dans le ciel spirituel du Sénégal, dont l’éclairement touche aujourd’hui encore les cœurs assoiffés de sagesse.
Son cheminement, entamé dès sa prime jeunesse, fut marqué du sceau de l’exigence intellectuelle et d’un amour fervent pour la vérité. De contrée en contrée, il recueillit le nectar des sciences religieuses, allant à la rencontre de maîtres dont il dépassa bientôt les enseignements. Toutefois, c’est à Tivaouane, cette cité alors encore discrète, qu’il choisit d’établir son sanctuaire. Là, il planta l’arbre de la connaissance, et ses racines, profondes, nourrissent aujourd’hui encore des générations entières.
El Hadji Malick Sy n’était point seulement un transmetteur ; il était un architecte de l’âme. Enseignant rigoureux, écrivain inspiré, orateur au verbe clair et au cœur ardent, il sut conjuguer science et mysticisme, rigueur et miséricorde. Ses poèmes religieux, d’une beauté sobre et lumineuse, forment un viatique pour quiconque cherche à gravir les degrés de la spiritualité soufie. Il n’y a point de pédanterie dans son œuvre, mais une clarté rare, une sagesse ancienne, presque biblique.
À travers ses disciples, ces hommes et femmes devenus les vigies de son enseignement, il essaimera des écoles, des zawiyas, des foyers de savoir où le Coran s’enseigne avec amour et où le nom du Prophète Muhammad (PSL) se prononce avec une tendresse filiale. Car au fond, toute sa vie fut une louange incarnée, une quête inlassable d’excellence spirituelle au service du Bien.
Disparu en 1922, El Hadji Malick Sy ne s’est point éteint ; il a changé de demeure. Ses traces abondent dans les rues de Dakar qui portent son nom, dans les murs blanchis de Tivaouane qui résonnent encore de ses sermons, dans les nuits du Mawlid où ses vers sont psalmodiés comme des prières d’éternité. Son héritage n’est point figé dans le marbre des mausolées, mais palpite dans le cœur de tout un peuple.
En cette époque troublée où les repères vacillent et où l’homme moderne se cherche dans le capharnaüm des fausses certitudes, le legs de Malick Sy apparaît tel un havre, un phare dans la nuit. Sa voix, pleine de douceur et de fermeté, nous murmure encore cette vérité essentielle : qu’il n’est de grandeur durable que dans la quête sincère de Dieu et le service désintéressé de l’humanité.
Tivaouane, par lui transfigurée, demeure à jamais le berceau d’une espérance. Et lui, El Hadji Malick Sy, reste cette étoile fidèle au firmament de notre mémoire collective, non pas une étoile filante, mais un astre d’orientation pour les âmes en quête de lumière.
